Les yeux, tout pour bien les chouchouter
Se mouvoir, créer, travailler, contempler une œuvre, un paysage ou un écran… La vue est le sens humain le plus utile et le plus sollicité, avec environ 80 % des perceptions sensorielles transitant par les yeux. Exposés et fragiles, ces derniers demandent toutefois quelques (bonnes) habitudes pour préserver son capital vision tout au long de sa vie. Mise en lumière !
Constat invariable : nos fenêtres sur le monde perdent en éclat avec le temps. Les yeux, car c’est bien d’eux dont il s’agit, n’échappent pas au vieillissement qui affecte les organes et les différentes fonctions du corps humain.
« Cette dégradation liée à l’âge est inéluctable, mais elle ne représente qu’une partie des facteurs de risques impliqués dans l’altération de la vision. De fait, on estime que la moitié des troubles oculaires qui frappent les sociétés modernes résulte de nos comportements et de nos modes de vie, qui ont un impact majeur sur la façon dont l’œil se développe et vieillit », souligne Jean-François Korobelnik, professeur d’ophtalmologie et chef du service d’ophtalmologie du CHU de Bordeaux.
En clair : il est tout à fait possible, et recommandé, de préserver sa vision en prêtant attention à ses yeux et aux sources d’agressions auxquelles ils se retrouvent confrontés au quotidien.
Faire face aux écrans
À tout seigneur tout honneur : l’écran sous toutes ses formes (télévision, ordinateur, tablette, Smartphone…). Selon une enquête menée en 2021 par NordVPN, les Français sont connectés à Internet près de huit heures par jour, avec une consommation d’écran toujours plus élevée chez les jeunes.
Principales conséquences : des yeux qui piquent ou brûlent, larmoyants ou au contraire trop secs, l’impression de voir flou, des maux de tête… « Ces symptômes entraînent des difficultés à lire et à se concentrer, d’où une sensation de fatigue qui peut parfois se manifester. Il ne s’agit toutefois pas d’une pathologie, mais simplement de répercussions passagères de la répétition du phénomène d’accommodation assorti à un manque de clignement des yeux », précise le Pr Korobelnik.
Quelques réponses simples permettent de limiter le risque de fatigue oculaire : éviter les reflets (fenêtre ou lumière directe) sur l’écran ; opter pour la plus grande diagonale possible ; s’accorder des pauses régulières, idéalement cinq minutes toutes les demi- heures ; maintenir une bonne qualité et une bonne humidité de l’air ; porter des lunettes à verres filtrant la lumière bleue ; penser à cligner des yeux et… faire des exercices.
« Les yeux peuvent être fainéants, surtout au bout de plusieurs heures à scruter un écran. L’un peut alors dominer l’autre, et les deux finissent par ne plus travailler ensemble. Pour rétablir la situation, il suffit de placer son doigt en face de soi, bras tendu, et de le rapprocher peu à peu de son nez sans cesser de le fixer. Répéter cet exercice trois fois et le renouveler plusieurs fois au cours de la journée permet de faire travailler le muscle oculaire et rétablir la convergence », indique Dan-Alexandre Lebuisson, ophtalmologue et co-auteur du livre La vue pour les nuls.
L’extérieur, pour le meilleur et pour le pire
Au-delà des écrans, le cadre intérieur peut s’avérer restrictif pour des yeux qui ne focalisent que sur des objets à proximité. Sortir au grand jour et profiter de sa lumière naturelle dans de vastes espaces réduirait notamment les risques de myopie précoce, ainsi que l’ont démontré des études internationales menées chez l’enfant.
« Privée de lumière naturelle, la rétine produit moins de dopamine, ce qui pourrait stimuler la croissance des globes oculaires. Or, un œil myope est un œil trop long : l’image se forme en avant de la rétine, et non sur celle-ci. En outre, passer davantage de temps à l’extérieur sollicite moins la vision de près, on regarde au loin au lieu de rester le nez collé à ses livres ou à un écran », explique Jean-François Korobelnik.
Aussi appréciée soit-elle, la lumière du soleil s’accompagne toutefois d’un autre type de danger : les UV, susceptibles de provoquer des dommages immédiats, de type inflammation ou brûlure de la cornée, mais également d’entraîner un vieillissement prématuré des tissus de l’œil, favorisant le développement de cataracte et de dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA).
Les lunettes de soleil s’avèrent par conséquent incontournables par temps ensoleillé ainsi qu’en cas d’exposition prolongée à une forte réverbération : montagne, plan d’eau, désert… Concernant les verres, le choix de la couleur, du matériau et du traitement (antireflet, polarisés, anti-rayures…) dépend des goûts personnels et le niveau de protection (classification de 1 à 4) de l’intensité lumineuse. Un marquage CE et une filtration de 100 % des UV nocifs sont, en revanche, indispensables pour garantir la sécurité des yeux.
Des montures enveloppantes sont de surcroît à privilégier, afin de limiter le passage des rayonnements par- dessus, par-dessous et sur les côtés.
Point d’attention : les enfants sont particulièrement vulnérables aux UV, en raison d’une cornée plus fine et d’un cristallin très transparent qui protègent moins la rétine que chez les adultes. Dès le plus jeune âge, ils doivent donc être équipés de verres solaires de qualité et adaptés à leur morphologie.
Bonnes corrections
Le soin des yeux passe aussi par la correction des troubles visuels, qui affectent trois adultes sur quatre en France, selon la DREES. Lunettes, lentilles, chirurgie… différentes méthodes, plus ou moins simples, pratiques et onéreuses, permettent de bien faire la mise au point et donc moins fatiguer ses yeux.
Le diagnostic, le conseil et la prescription de solutions adaptées à chaque cas particulier passent par l’expertise de l’ophtalmologue.
Une première visite est conseillée avant 4 ans, pour identifier un éventuel trouble. Par la suite, les rendez-vous peuvent être espacés pour les plus jeunes (4-5 ans) et se rapprocher avec l’âge pour devenir bisannuels après 50 ans, puis annuels à partir de 60 ans.
« L’objectif est toujours le même, il s’agit de vérifier le fonctionnement de la vision pour apporter les corrections nécessaires, mais aussi de repérer les pathologies ophtalmiques susceptibles de se développer avec l’âge ou avec l’évolution d’une maladie chronique : rétinopathie diabétique, DMLA, cataracte, glaucome… », détaille le Dr Lebuisson.
Bon ventre, bon œil
L’importance de certains nutriments a été mise en évidence pour prévenir et traiter le vieillissement oculaire en luttant contre le stress oxydatif et ses radicaux libres, qui détériorent progressivement les cellules de l’œil et font le lit de la DMLA. Au menu :
• VITAMINE A, présente dans l’huile de foie de poisson, le foie de toute provenance, les produits laitiers, les œufs cuits… ;
• B-CAROTÈNE, présent dans les carottes, les épinards cuits, le cresson, les mangues, les tomates, les pêches… ;
• VITAMINE E, présente dans les graines, les noix, les germes de blé, les huiles végétales… ;
• VITAMINE C, présente dans les agrumes, les fraises, les brocolis, les poivrons, les choux… ;
• ZINC, présent dans les huîtres, le foie, les crustacés, le fromage, le bœuf, le porc, les légumes secs cuits… ;
• LUTÉINE ET ZÉAXANTHINE, deux pigments présents dans les yeux et dans les choux, les épinards, le céleri, la citrouille, le maïs, les olives vertes… ;
• ACIDES GRAS ESSENTIELS, présents dans les poissons gras (saumon, sardine, maquereau, hareng…), mais aussi dans la viande et les œufs d’animaux nourris avec des omégas-3.
Petits gestes du quotidien
Au quotidien, de petites attentions font le plus grand bien aux yeux et les aident à affronter les multiples sollicitations de l’environnement. Un sommeil de qualité et suffisant (sept à huit heures en moyenne pour un adulte) facilite la récupération globale, muscles oculaires compris.
L’activité physique entretient pour sa part l’acuité visuelle et participe à prévenir l’apparition de certaines maladies liées à l’âge.
Les porteurs de lentilles sont invités à se laver les mains avant de les manipuler et à s’en délester au minimum pour dormir, voire plus longtemps selon leur composition (certaines lentilles souples ne doivent pas être portées plus de dix heures d’affilée).
Les amateurs de maquillage ont, quant à eux, intérêt à laisser la peau des paupières respirer régulièrement, pour éviter les gonflements, mais aussi les risques de coulures nocturnes susceptibles d’irriter les yeux.
Les gouttes ophtalmiques peuvent aider à lutter contre la fatigue oculaire, les irritations ou un manque de lubrification, mais demandent un conseil médical ou pharmaceutique pour choisir le traitement adapté à chaque problématique pour s’épargner d’aggraver la situation.
Enfin, de nombreuses approches et techniques médicales ou paramédicales sont à disposition pour améliorer la santé des yeux, depuis « le massage yoga jusqu’à l’acupuncture, en passant par le shiatsu, la phytothérapie, l’aromathérapie, la mésothérapie, l’hypnose et les remèdes de grand-mère, à l’instar du sachet de thé noir infusé en cas d’inflammation », liste la docteure Marie-Anne Giacometti dans le livre Comment prendre soin de vos yeux.
À chacun de s’orienter en fonction de sa sensibilité personnelle et de son besoin de chouchouter la prunelle (et le reste) de ses yeux !
Protection anti-traumatismes
Les yeux sont vulnérables aux agressions potentielles de l’environnement, qu’elles soient physiques (projections, chocs…) ou chimiques (détergents, pollutions…). Au travail, les risques professionnels sont couverts par l’emploi imposé de dispositifs de protection oculaire.
Les loisirs, à l’instar du bricolage ou du jardinage, demandent, en revanche, une vigilance personnelle et le port de lunettes de protection adaptées à chaque type d’activité à risque.
Certains sports exposant à des contacts violents, notamment avec un projectile de petite taille, une crosse ou des obstacles (hockey, squash, badminton, VTT, équitation…) peuvent inciter les pratiquants à porter des lunettes ou masques spécifiquement conçus pour leur pratique.
Autre activité physique incitant naturellement au port de lunettes : la natation, à moins d’être fan de l’effet myxomatose en sortie de bassin…
En savoir +
À lire
• Comment prendre soin de vos yeux, des Drs Marie-Anne Giacometti et Yves Moreau, éd. Guy Trédaniel, 2019.
• La vue pour les nuls, ouvrage collectif, Éd. First, 2013.
À consulter
Le site de l’ASNAV (Association nationale pour l’amélioration de la vue) propose un grand nombre d’actualités, dossiers et services pour tout savoir sur la santé visuelle et les moyens de l’améliorer.
L’espace « Patients » du site du Syndicat national des ophtalmologistes de France regorge d’informations sur l’œil, depuis son histoire jusqu’aux maladies qui le menacent et les traitements à disposition.
Olivier VACHEY
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